Le Lac Blanc à Chamonix
Mais pourquoi est-il si blanc?
Par Valérian le
Résumé de l’aventure :
Départ : Nous avons suivi le GRP (Grande Randonnée de Pays) Tour du pays du Mont-Blanc au départ du parking gratuit après Argentière sur la route des Montets (45°59'56.6"N 6°55'26.5"E).
Le chemin que nous avons suivi est réalisable même par des enfants, il n’y a pas de réelle difficulté mise à part la première partie qui comprend un dénivelé important. Il suffit d’y aller à son rythme et de faire des pauses pour souffler !
Le Lac Blanc se situe sur la commune de Chamonix-Mont-Blanc à une altitude de 2352 mètres. Il fait parti du massif des Aiguilles Rouges. Il se décompose en deux parties, l’une fait face à un panorama intégrant le massif du Mont Blanc et l’autre, la partie arrière, est encerclée au ¾ par la montagne.
Ce site est splendide, de part son panorama avec le Mont Blanc et la mer de glace, mais aussi par la couleur de l’eau des lacs qui est d’un bleu glacier intense. La neige qui recouvre encore au mois de juin les deux lacs ainsi que la montagne environnante est pigmentée de rouge. D’où vient cette pigmentation, c’est un mystère ? Ou alors cela provient peut-être de l’algue des neiges. Malgré un mois de juin chaud, il a neigé le mercredi précédent notre montée. Donc encore beaucoup de neige autour et sur les lacs.
Mais commençons par le début ! Il existe plusieurs chemins pour monter jusqu’au Lac Blanc. Il est même possible de prendre le téléphérique pour se simplifier la tâche. Celui de la Flégère.
Nous, nous sommes partis un samedi matin tôt dans la matinée, depuis un parking gratuit situé à quelques minutes de route après Argentière. Une fois la route traversée, nous avons pris le GRP (Grande Randonnée de Pays) Tour du pays du Mont-Blanc. Le chemin jusqu’au refuge ne fait que 5 Km avec un dénivelé de presque 1000 mètres. Il faut environ 3h de marche pour atteindre le Lac Blanc, mais ce n’est pas si facile, surtout chargé comme une mule. Nous avons mis presque 5h à monter jusqu’au refuge, avec une petite pause repas au milieu. La première partie en lacet grimpe bougrement avec un bon dénivelé de plus de 400m pour 1,5Km. Autant vous dire que pour une mise en jambe post-confinement, c’est raide, très raide ! C’est tellement raide que le chemin se transforme parfois en escalier de roche. Cependant le chemin est des plus praticables et ne comporte pas de danger.
Après ces deux premiers kilomètres à transpirer dru, la pente s’adoucit et la marche devient moins sportive (rassurez-vous, la fin est bien raide aussi 😁).
En chemin nous avons croisé quelques bouquetins, qui parfois s’aventurent sur le chemin. En prenant le temps de ne pas faire de bruit, il est possible de les observer de près, même très près. Parfois il suffirait de tendre la main pour pouvoir les caresser. Mais comme je tiens encore à mes doigts, je préfère leur tirer le portrait.
Tout au long de la randonnée, nous avons pu admirer le Mont-Blanc ainsi que le glacier d’Argentière. C’est un panorama magnifique. Un dégradé de verts sombres des forêts qui s’estompe sur les hauteurs pour laisser la place au gris de la roche nue et enfin au blanc éclatant de la neige qui recouvre les sommets. C’est un paysage parfait pour prendre son repas. Après avoir été confiné deux mois, que demander de mieux ?
Sur le chemin qui mène au refuge nous avons traversé quelques cours d’eau qui s’écoulent tranquillement. Certains ont creusé des tunnels dans la glace qui sont encore là.
Nous avons aussi traversé un pierrier, où le but du jeu est de ne pas mettre le pied entre deux pierres ni de perdre l’équilibre. Nous avons été amenés à traverser des langues de neige par-ci, par-là. Cette neige d’été ressemble plus à de la glace vue sa dureté et il est nécessaire de redoubler de prudence pour ne pas bêtement glisser.
Arrivé au pied du Lac De Cheserys, nous avons eu le plaisir de découvrir sur une partie du pourtour cette eau au bleu si particulier qui fait penser à de la menthe glacée. Cependant, dans son ensemble le lac est plutôt sombre. Il y flotte une couche épaisse de neige gelée, sale et en partie recouverte d’une substance rouge lie de vin. Comme si un géant avait renversé sa bouteille de Bourgogne Chambolles Musigny (Sacrilège !).
À partir de ce lac, la pente jusqu’au refuge est assez raide, surtout que le sol est recouvert de cette neige dure et glissante (ça serait moins drôle sinon). Certains randonneurs, mieux équipés, ont chaussé leurs crampons. Mais, comme d’habitude avec Joe, nous avons fait l’assertion à l’ancienne, chaussures, bâtons et une prière aux dieux des glaces pour ne pas glisser et se rétamer lamentablement comme une marmotte imbibée au genepi. Pas de chemin à suivre sur la glace, juste une destination, qui pour nous était ces échelles en fer fixées dans la roche. Ce qu’il faut savoir, c’est que la neige a fondu le long de la roche dans laquelle est fixée l’échelle et cela a créé un fossé d’une quarantaines de centimètres de large sur profond… Il faut donc se placer près du bord, mais pas trop, sinon on tombe, et pas trop loin, sinon on n’atteint pas l’échelle… N’oubliez pas les 12Kg accrochés au dos. Bref, on a monté des échelles.
Bon, suite aux échelles, il reste encore une centaine de mètre à faire. La pente est raide et les pieds sont lourds et gauches. Il faut mettre un pied devant l’autre et essayer de se persuader que la fatigue n’est qu’une information secondaire. Nous sommes épuisés et pourtant nous n’avons parcouru que 5Km.
Arrivés au refuge, nous nous sommes écroulés sur les chaises de la terrasse pour reprendre des forces. Nous avons pris le temps de déguster une bière classique au prix prohibitif (il faut vraiment la déguster) avec un panorama grandiose (en fait, c’est peut-être le panorama que l’on paye ?).
Petite parenthèse pour parler du refuge. La surface extérieure du bâtiment est recouverte de lattes de bois noirci par le temps et il repose sur un socle en pierres sèches. L’intérieur est paré de bois clair ce qui le rend vraiment chaleureux et sur le devant du refuge se trouve une terrasse qui donne sur la partie basse du Lac Blanc. C’est une belle bâtisse qui ne dénature en rien les lieux, comme si elle avait toujours été là.
Cependant, les tarifs pratiqués sont, je trouve, bien trop élevés. Il ne propose pas d’eau en dehors de leur bouteille de 1,5L à 5€. Si vous allez leur demander de remplir votre gourde, ils vous indiqueront le lac dans lequel eux même puisent l’eau pour remplir un réservoir. Donc pas d’eau potable hors celle proposée en bouteille. Je vous conseille de venir avec suffisamment d’eau (ou de pastille purificatrice) et de nourriture pour éviter de vous ruiner au refuge. De même le logement pour une nuit n’est pas des plus abordables. Sinon, prenez du liquide (beaucoup si vous comptez vous y restaurer), car votre carte bancaire ne vous sera d’aucune utilité.
Tout cela est sans compter sur l’irascibilité du maître des lieux. Depuis cette année (2020), il n’est plus possible de bivouaquer au niveau du Lac Blanc. Le bivouac est semble t’il toujours toléré au niveau du Lac De Cheserys (difficile d’avoir une information fiable sur les lieux de bivouac).
Le gardien du refuge rappelle donc à tous ceux qui passent avec une tente sur le dos que le Lac Blanc n’est plus une zone de bivouac. Sa manière de faire est assez abrupte et très frustrante. Je comprends son agacement à devoir répéter encore et encore ce même message, mais il me semble qu’avec un peu de pédagogie et plus d’explications que juste « Hey, vous là-bas, c’est interdit le bivouac ici ! », le message passerait bien mieux. Ne serait-ce que « Bonjour, je suis le gardien du refuge. Je ne sais pas si vous savez, mais le bivouac a été récemment interdit sur cette zone afin de préserver la nature ». Effectivement, en bas du refuge il y a une pancarte où cette interdiction figure ainsi que sur le site web du refuge.
Mais sans mauvaise foi aucune, je ne suis pas allé sur le site du refuge, et en y arrivant j’étais bien trop fatigué pour faire attention à une pancarte (oui, c’est mal, je sais…)
Bref, passée cette déconvenue, le site est juste exceptionnel ! Lors de notre passage, le lac en contrebas était recouvert de neige et celui en amont l’était partiellement. Avec cette neige qui les recouvre, on a presque envie d’aller y poser le pied et de se promener au milieu. Mais en s’approchant du bord, la réalité se rappelle vite à nous lorsque la neige de la berge commence à céder sous notre poids et notre pied qui se recouvre d’eau.
D’ailleurs, sous la neige gelée qui se trouve en contrebas de la terrasse du refuge, se sont formées des galeries où une marmotte dodue attendait patiemment que les bipèdes bruyants s’effacent pour enfin retrouver sa liberté de mouvement.
L’eau du lac est limpide. Si claire que l’on voit assez loin sous la couche de neige qui l’en recouvre. Et ce bleu glacial avec ses dégradés, allant d’un léger tintement à un bleu profond et saturé que l’on croirait réservé aux filtres Instagram.
Pendant que nous faisions le tour du Lac Blanc à la recherche d’un lieu où puiser un peu d’eau en toute sécurité, une bande de gentils allumés grimpaient chacun leur tour la montagne pour redescendre jusqu’au lac en snowboard. Gamelles et fous rires garantis. Il faut dire qu’ils ont du mérite. Déjà il leur a fallu grimper jusqu’au lac avec le snowboard sur le dos, puis gravir encore cette pente raide, pour enfin pouvoir se laisser glisser. Mais le plaisir de la glisse sur ce flanc de montagne doit vraiment valoir le coup.
Tout comme monter avec 12kg de matériel, dont bien 5kg de matériel photos, pour pouvoir photographier la voie lactée, que l’on n’est même pas sûr de voir 😋.
Ha, cette voie lactée. Encore une fois elle s’est faite désirée et il a été difficile de la capturer ! Pendant une bonne partie de la nuit le ciel était couvert d’un léger, mais bien présent, voile nuageux.
À 3h du matin, le ciel était suffisamment dégagé pour que nous puissions observer le ciel. Si le confinement a eu certains inconvénients au quotidien, avoir accès à un ciel sans avion qui le traverse est une chose très appréciable. Pas de vieille trainée lumineuse à supprimer sur les clichés en pause longue.
Ce qui est impressionnant lors de ces nuits d’observation du ciel en pleine montagne, c’est ce doux silence qui apporte la quiétude. Le monde semble s’être arrêté, un temps, pour prendre une pause bien méritée avant de retourner au quotidien. C’est le moment de s’allonger au sol et de profiter du spectacle en oubliant complètement le quotidien où encore la difficulté de l’ascension.
En face de nous sur l’autre versant de la montagne, du côté des mers de glace, nous avons vu des petits points lumineux s’animer et monter vers les sommets. Selon Joe, ce ne sont pas des lucioles géantes, mais des alpinistes qui partent au petit matin à l’ascension de ces hautes montagnes lorsque la glace des glaciers est encore bien prise. À 4h, le soleil commençait déjà à lancer de faibles rayons qui annoncent son retour imminent et nous, nous sommes allés faire une sieste de deux heures - ponctuée de discussions entre les bouquetins - avant de pouvoir assister au lever de soleil.
Lorsque les rayons du soleil ont accroché les cimes, leur neige s’est discrètement teintée de violet. Cet instant, où les couleurs douces et pastelles du matin, est des plus fugaces.
Encore une fois, il ne reste qu’à s’asseoir et à profiter du spectacle que la nature nous offre.
Et puis, c’est déjà l’heure de redescendre. Retrouver la foule, sur le chemin, qui grimpe pour la journée dominicale, pendant que nous, nous reprenons la route.